Osho,
Êtes-vous contre toutes les religions ?
Est-ce que la religion n'est pas quelque chose d'essentiel pour l'être humain ?
Oui, je suis contre toutes les religions, parce que je suis pour La Religion.
Le fait même qu'il y ait tellement de religions prouve que quelque chose est faux à la base; cela prouve que nous n'avons pas été capable de découvrir la vérité au sujet de la religion, parce que la vérité ne peut être qu’UNE - seuls les mensonges peuvent être des centaines. Vous pouvez créer autant de fictions que vous voulez; c’est le fruit de votre imagination. Mais la vérité n'est pas votre imagination.
La vérité est une révélation. Elle est déjà là. Vous n'avez pas besoin de 1'inventer; vous devez la découvrir.
Je suis contre toutes les religions, car toutes ces religions ne sont pas des religions. Si elles étaient des religions, il n'y aurait qu'une seule religion pour le monde entier. Il n'est même pas possible qu'il y ait deux religions - que dire de trois cent religions! - c'est absolument absurde.
C’est curieux que l'être humain continue à tolérer ça. Elles ne sont toutes que des fictions, créées par des gens différents, différentes sociétés, différents lieux. Elles n'ont rien à voir avec ce que la religion est réellement, parce que la religion n'a rien à voir avec la géographie, ni
avec 1'histoire. Ces choses là n'ont pas leur place lorsqu'il s’agit de religion.
Avez-vous jamais pensé à une science nationale, raciale, locale, ou liée à une période de l'histoire, à la géographie?
Si 1'eau bout à cent degrés aujourd'hui, ici, c’est qu'elle a bouilli à cent degrés partout, dans le passé, et elle continuera pareil dans le futur. Que la personne qui fasse bouillir de l'eau soit Juive, Hindoue, Chrétienne, ou Communiste, ne fait aucune différence; qu'elle croit en Dieu, ou qu'elle n'y croit pas; qu'elle soit un pécheur ou un saint. Tout cela ne fait aucune différence; 1'eau bouillira a cent degrés, pareil.
C'est la vérité, et il n'y a aucune raison d'inventer la moindre fiction à ce sujet.
L'expérience religieuse est une vérité. Lorsque vous la découvrez vous ne la trouverez ni Chrétienne, ni Hindoue, ni Musulmane, ni Bouddhiste. Elle n'a rien à voir avec ces mots. Au moment où vous découvrez la vérité religieuse, 1'espace et le temps perdent complètement leur signification. Elle est au-delà du temps et de 1’espace. Elle est immatérielle. Cinq mille ans avant, cinq mille ans après, c’est exactement pareil.
L'univers reste authentiquement le même.
Il ne porte aucun faux visage qu'il utiliserait l'un après l'autre, afin que lorsqu'un masque convient il l'utilise, et que lorsqu'un autre visage convient il utilise celui-là. L'univers n'a aucun masque - il est totalement nu. Il n’est pas comme vous; il n'a aucune personnalité. La vérité n'a aucune personnalité.
Vous, vous n'avez pas seulement une personnalité, vous avez des personnalités; chacun de vous, beaucoup de personnalités, car vous avez besoin de visages différents, dans différentes situations, avec des gens différents.
Quand vous parlez à votre femme, une certaine personnalité vous est nécessaire : celle d'un mari. Quand vous parlez à votre copine, vous parlez autrement; vous utilisez la personnalité d'un amant. Quand vous parlez à un prêtre, vous vous comportez certainement d'une autre façon encore.
Et quand vous parlez à un employé, vous comportez-vous de la même façon que vos le feriez avec le rabbin, le pape, ou le mahatma?
Non! Quand 1’employé traverse la pièce, vous ne remarquez même pas que quelqu'un passe. L'employé n'est pas humain. Vous ne lui dites pas "Hello!"; il ne 1'attend pas de vous non plus. Il va et vient, fait son travail - c'est un robot, il est payé pour ça. Vous, vous lisez votre journal, vous n'avez même pas un regard pour lui. Vous ne lui demandez rien, pas même "Comment allez-vous?" Non, personne ne le demande; vous êtes le maître.
Mais quand vous allez au bureau et que vous êtes devant votre patron, la situation s’inverse - maintenant c'est vous 1’employé.
Vous, vous êtes assis et le patron regarde ses dossiers comme si vous n'étiez pas là, comme s'il n’y avait personne. Et peut-être regarde-t-il ces dossiers sans aucune raison réelle. Il tourne simplement les pages pour vous faire voir de qui vous dépendez - il n'a nul besoin de vous prêtez la moindre attention.
Si vous vous observez vous-même, vous verrez combien de fois, en vingt quatre heures, vous changez de personnalité. C’est devenu un processus tellement automatique que vous n'avez aucun effort à faire pour en changer; le changement est devenu automatique. Vous voyez votre femme arriver - votre personnalité change automatiquement. Vous voyez votre patron arriver - votre personnalité change automatiquement. C'est votre routine depuis tellement longtemps, que maintenant. . . Vous avez une chose à comprendre au sujet de 1’être humain: c'est que le mental de 1'être humain a une partie robotique en lui.
Quand vous apprenez quelque chose, vous devez faire attention. Si vous apprenez par exemple à conduire, vous devez être alerte, faire attention à tellement de choses; la route, les gens, les autres véhicules qui circulent. Vous devez faire attention aux vitesses, au volant, à l’embrayage. Et quand quelqu'un apprend, au début, il trouve très difficile d'avoir à faire attention à tant de choses à la fois.
Une fois qu'on appris, qu'arrive-t-il? Vous pouvez alors conduire en chantant, en parlant, en écoutant la radio. Votre mental a fait passer "conduire" dans une autre section, et cette section est la partie robotique du mental- C'est maintenant le robot qui s'occupe de tout ce dont vous aviez à vous occuper au début.
La même chose se passe en ce qui concerne vos personnalités.
Vous n'êtes donc même pas conscient que vous en changez aussi rapidement - ça ne fait aucun bruit, c'est invisible - mais si vous regardez, vous verrez que tout a changé.
Je voyageais un jour, en train, entre Delhi et Amritsar.
Dans mon compartiment il y avait une femme, jeune, très belle. Et à chaque arrêt, 1'homme qui voyageait avec elle - il n'avait pas pu obtenir de siège dans le coupé, parce que dans ce type de compartiment il n’ y a que deux places - il était donc obligé d'être dans un autre compartiment - mais à chaque arrêt, il arrivait en courant, en apportant ou des fruits, ou des bonbons, ou ceci, ou cela.
Je lui ai demandé: " Êtes-vous marié avec cette femme?"
Il me répondit : "Oui. On est marié depuis sept ans."
Je lui dis: "C’est pas la peine de me mentir. Vous n'êtes même pas marié depuis huit jours."
Ça le choqua, mais il dit: "Comment 1'avez-vous découvert?"
Je lui dis : "Ceci est parfaitement suffisant: aucun mari ne viendrait à chaque arrêt avec des fruits, des bonbons, en demandant 'As-tu besoin de quelque chose?, et en embrassant, en enlaçant! Aucun mari,.. et marié depuis sept ans? Impossible! Vous n'êtes pas marié du tout".
Il répondit: "C'est vrai. Elle est la femme de quelqu'un d'autre. Je suis moi aussi marié, et marié depuis sept ans, mais avec une autre femme. Et avec cette femme - ce que vous dites est bien ce que je fais. Même si je peux obtenir un siège près d'elle, je ne le prends pas. Je voyage dans un autre compartiment, en trouvant une excuse. Et quand je l'ai laissée dans son compartiment, je ne la revois plus avant que l'on descende au prochain arrêt, pour se retrouver."
Et il me demanda: "Mais comment 1'avez-vous découvert?" Je lui dis; "C’est pas bien sorcier, c'est tellement simple. Même après huit jours de mariage, ce comportement stupide que vous vous acharnez à avoir, ici, à chaque gare, se serait arrêté, il aurait disparu, car ce comportement c'est le jeu préliminaire, pas le jeu d'après!"
II demanda :"Que voulez-vous dire par jeu préliminaire et jeu d'après?"
Je lui dis: "Exactement ces mots: jeu d'avant..." Avant d'avoir obtenu ce que vous vouliez de la femme, c'est le jeu préliminaire; vous êtes en train de la persuader. Et ce que vous faites avec votre épouse, c'est le jeu d'après: maintenant vous espérez d’une manière ou d’une autre que le compartiment se renverse dans la rivière, déraille... qu'un miracle arrive, pour que vous n’ayez plus à rencontrer encore cette femme à la station qui arrive, et où vous devez descendre. Et vous pensez à des milliers de choses, qu’après tout, des miracles se produisent parfois, elle peut bien disparaître! Quelqu'un va peut-être l’enlever, ou la tuer; tout est possible dans ce vaste monde, il y a tellement de choses qui arrivent tous les jours.'
Mais rien ne se passe. Vous retrouvez votre femme à l'arrivée, vous êtes là, à lui dire des douceurs 'Combien j'attendais d'être avec toi, combien tu m'as manqué, je ne t'ai pas oublié une seule seconde.' Certainement vous vous en êtes rappelé, mais d'une toute autre façon!"
L'existence n'a pas de personnalité. Il n'est donc pas questions de plusieurs personnalités, elle est simplement ce qu'elle est. Expérimenter l'existence telle qu'elle est, c'est connaître la vérité. Le plus simple est d'agir à partir de votre propre centre, car c'est là que vous êtes lié à l'existence. Vos mains peuvent toucher une fleur; vos yeux peuvent voir la couleur des nuages, du ciel, du lever du soleil. Vos oreilles peuvent entendre la chanson des oiseaux, le son de l'eau qui coule, ou juste le vent passant à travers les arbres; ou, à 1’automne, les feuilles qui tombent silencieusement, mais qui murmurent quand même quelque chose. . .
Mais il y a une "distance" entre vous et le nuage, entre vous et la feuille qui tombe, entre vous et les étoiles.
Aussi proche que vous arriviez à être, il y a toujours une séparation.
Le mot même d’"intimité" signifie deux personnes, deux choses, pas une. Il reste un intervalle, aussi proche que vous puissiez être. Un espace est là, quelle que soit 1’intimité.
C'est dans une affaire d'amour que vous arrivez à être le plus proche d'une personne, pour quelques instants peut-être - je ne dis pas pour quelques heures, ou quelques jours - peut-être que pendant quelques instants, vous arrivez à être le plus proche possible d'une personne, mais cependant. . . il y a un intervalle. Vous pouvez crier, mais votre cri ne pourra pas atteindre son but. Vous pouvez étendre votre main, mais vous ne pouvez pas toucher…
L'intervalle, aussi petit qu’il soit, est cependant assez grand pour que vous restiez deux entités séparées.
Vous aimeriez devenir un, et c’est le drame de tous ceux qui s'aiment, et c'est aussi la raison pour laquelle toute histoire d'amour échoue. C'est obligé, car ils essaient de réussir 1'impossible.
Ce n'est la faute de personne. Ils arrivent très proches. . . le moment d'intimité est tellement beau qu'ils aimeraient devenir encore plus proches, mais il y a une limite.
Quelle est la restriction?
L'autre est l'autre, et il n'existe aucun moyen pour que vous deux puissiez devenir un !
Jean-Paul Sartre a dit, "L'enfer, c'est l'autre." Cet homme n'est pas un psychanalyste, mais il est souvent arrivé que des peintres, des poètes, des romanciers, des auteurs dramatiques, des artistes en soient venu à découvrir quelque chose que les soi-disant experts, qui étaient supposés faire ces découvertes, cherchent, cherchent, et ne trouvent jamais!
Freud n'a jamais découvert que 1'autre était 1'enfer - ni Jung, ni Adler, ni toute la compagnie qui les a suivi. Jean-Paul Sartre, dans cette courte déclaration, dit quelque chose de tellement vrai et de tellement profond que c'est une révélation - l'autre est 1'enfer. Pourquoi?
Parce que vous voulez vous fondre, vous mélanger, de telle sorte que ce "deux" disparaisse, et que vous deveniez un, unifié. . . afin que vous puissiez voir par les yeux de votre bien-aimé-e, et que vous puissiez sentir, et que vous puissiez goûter, et que vous puissiez entendre - plus comme un être séparé, mais comme faisant un avec la personne que vous aimez - afin que vos deux centres sautent l'un dans l'autre et deviennent un seul centre !
C’est là que la profonde intuition de Sartre se révèle. Il dit : "L’enfer, c'est 1'autre."
Il n’y a aucun moyen…
L'autre reste l'autre, et il continuera à rester l'autre. Quoi que vous fassiez, tout échoue. Et ce n’est pas la faute de 1'autre. L'autre est exactement pareil, en train de faire tout ce qu'i1 peut… mais vous restez l'autre ! Les deux essaient, mais ils vont échouer; car ce qu’ils désirent est impossible.
Leur solitude est leur être même.
Aucune transgression n'est possible, vous ne pouvez pas violer 1’intégrité de 1'être de quelqu'un d'autre, entrer dans 1'être de quelqu'un d'autre. C'est heureux que vous ne le puissiez pas, car si les gens étaient capables de violer 1'intégrité de 1'être des autres, il n'y aurait alors plus aucun espoir pour 1'humanité. Il n’y aurait aucun espoir qu'une réelle liberté existe, jamais.
Car pourquoi, si une personne peut violer l’intégrité de votre être, pourquoi pas des tas d'autres aussi? Si c’était possible, plein de personnes pourraient le faire. Votre pureté, votre sacré, votre individualité, perdrait toute signification.
Sartre a raison. Il a vu le point, que 1'autre restera toujours 1'autre, et que le cœur aimant veut devenir un avec le bien-aimé-e. Il échouera. C'est le grand drame de ceux qui s'aiment. Personne ne connaît autant la détresse que les amants. Personne ne connaît la souffrance comme eux.
Quand il dit que l’enfer c'est 1’autre, il dit beaucoup de choses. I1 dit qu'i1 n'y a pas d’autre enfer que celui-là - que c’en est la seule expérience : quand vous êtes si proche et que vous sentez qu'il n'y a plus qu'un pas à faire, et que le paradis est à vous… mais avec ce pas là vous ne pourrez pas vous rencontrer.
Le but est devant vous. Vous êtes à la porte, mais quelque part vous ne pouvez même pas frapper à la porte. Elle est là, elle vous attend, non seulement elle vous attend, mais elle vous accueille, mais d'une certaine façon vous êtes paralysé. Il y a comme un cercle invisible autour de 1'autre personne et ce cercle vous ne pouvez pas le traverser, et à ce moment même vous allez prendre conscience que le même cercle existe autour de vous. Les cercles, quand ils deviennent proches, se touchent 1'un 1'autre, mais c'est seulement à la périphérie. Plus que cela n'est pas possible.
Faire demi-tour à la porte du paradis, c'est 1'enfer. II n'y a pas d'autre enfer.
La réalité entêtée de l’autre, le fait qu’il restera l’autre, devient votre échec, et devient 1’échec de l’autre personne aussi. Et vous ne pouvez pas non plus rester figé à ce point !
Essayez de comprendre: dans 1’existence, dans la vie, rien ne reste statique; ou vous allez de 1'avant, ou bien vous partez ailleurs. Aller plus loin, vous ne le pouvez pas, un mur invisible heurte votre tête et il n’y a aucun moyen - et rien ne reste statique, vous partez alors ailleurs… et le souvenir cuisant de l'échec, le souvenir si douloureux d'être arrivé si proche et cependant de le perdre...
C’est dans 1’amour que vous pouvez arriver le plus près, mais l’amour devient angoisse; à l'ultime fin, 1'amour tourne à 1'angoisse.
Bénis soient ceux qui n’ont jamais aimé, parce qu'ils ne sauront jamais que l'autre est l'enfer !
Pour vous protéger de cette expérience, toutes les sociétés ont essayé, d'une façon ou d’une autre… que 1'amour ne puisse pas arriver - pour cela le mariage est une bonne chose. Naturellement, en vivant avec quelqu'un pendant des années, vous aurez une certaine camaraderie, un certain besoin de 1'autre. L'autre devient une habitude.
Si votre femme s'en va pour quelques jours, vous êtes complètement perdu. Vous vouliez qu’elle parte pour quelques jours au moins, et quand elle part vous êtes perdu. Vous ne pouvez même pas trouver vos chaussures! Vous êtes incapable de trouver ce dont vous avez besoin dans la maison.
Tout à coup votre femme vous manque - et vous croyez que c'est à cause de 1’amour? Non, elle est devenu une habitude pour vous, elle a pris en main toutes les tâches de la maison; sans elle vous êtes complètement perdu, que faire? Même d'être en conflit avec elle fait maintenant partie de votre vie. Il n'y a plus personne avec qui se quereller dans la maison. Vous allez d'une pièce à l’autre - même la bagarre vous manque. Vous rentrez tard, personne ne fait de réflexion... vous allez tout droit vous coucher. Et la querelle de tous les soirs est devenu une partie tellement routinière pour vous que vous n’arrivez pas à dormir sans elle. C'est parei1 qu’un ours en peluche.
Je dors avec trois oreillers; un de chaque coté et un sous ma tête. Quand je voyageais en Inde, j'étais obligé d’emmener ces trois oreillers, et ils sont énormes, la plus grande taille. J'avais donc besoin d'une grosse valise seulement pour ces trois oreillers. Et quand par hasard j'étais avec quelqu'un et qu'il ouvrait mes valises, et dans 1'une - une grosse valise, la plus grosse taille disponible - seulement trois oreillers! Il disait: "Quoi?! Cette énorme valise et pour porter seulement trois oreillers ?"
Je disais: "Je ne peux pas dormir sans ces deux là. Ils sont absolument indispensables à mon sommei1. Si quelqu'un prend un de mes oreillers, il m'est alors difficile de dormir. Il me manquera la nuit entière."
L’épouse voulait partir se reposer un petit peu, quelques jours. Elle était lessivée - il me semble que c'est exactement le bon mot, lessivée - avec tous ces enfants et ce mari. Vient un moment où c'est vraiment trop. Mais quand elle part en vacances, les enfants commencent à lui manquer, leurs bruits, leurs bagarres. Son mari lui manque. Qui narguer?
Narguer est un tel jeu de pouvoir, et une telle joie. Le pauvre ami ne peut absolument rien faire, la femme est si puissante. Elle sait qu’à l’extérieur cet homme est un lion. Ça lui donne encore plus de joie de le harceler, et de lui prouver qu’il n’est juste qu’un rat - rien de plus. Tu es peut-être un lion a 1’extérieur, mais quant tu rentres à la maison, garde ta queue entre tes jambes, et rappelle-toi que tu n'es pas le chef !
Tout cela commence à lui manquer… avec qui se battre? Toutes les taches auxquelles elle était habituée commencent à lui manquer; elle n'a plus à s'occuper de personne. De petites choses commencent à lui revenir: le matin elle apporte le journal à son mari. Elle n'as jamais aimé ça; l’idée même de voir son mari, assis en face d'elle, caché derrière son journal. . . elle sait pourquoi il lit le journal, c'est juste pour l'éviter, elle, pour ne pas la voir. Mais maintenant qu'elle est loin de chez elle, elle se met à se demander si quelqu'un lui a donné son journal, ou non.
Et comment va-t-il faire pour trouver ses chaussure. . . et ses vêtements? Et il est bien capable de faire des choses idiotes dans la cuisine. La maison va peut-être prendre feu - tout est possible, . . "Qu’ai-je fait? Pourquoi suis-je venu ici? Et il n'y a rien d' amusant..." Tous les rêves qu'elle a habituellement chez elle se sont évaporés. Maintenant elle est impatiente de revenir aussi vite que possible.
Ils sont devenus des habitudes 1'un pour 1'autre. Ce n’est pas de l'amour.
Mais toutes les sociétés ont essayé cette toute simple formule pour vous protéger de 1’expérience de 1’amour - qui est terrible d'une certaine façon - mais qui peut aussi devenir une transformation.
Elle n'est jamais devenue une transformation pour Jean-Paul Sartre. J'en suis peiné pour lui. Il est arrivé très proche lorsqu'il a dit que l’enfer c'était 1'autre. Mais même en arrivant aussi proche, avec cette intuition, il rate encore quelque chose de plus important. Il insiste sur le fait que c'est 1’autre qui est responsable d’être un enfer. Non, 1’autre n'en est pas responsable. Il ne voit toujours pas 1’autre partie, 1’autre moitié : qu’il est lui-même aussi l'autre, pour l'autre partie. Créez-vous l'enfer pour l'autre personne? Vous ne créez pas l’enfer.
Alors comprenez un peu plus profondément. L'autre non plus ne crée pas l'enfer. Ne mettez pas ça sur le dos de l'autre.
Il s'agit simplement d'un phénomène naturel: vous pouvez être très intimes dans l'expérience de l'amour, mais seulement intimes. Vous ne pouvez pas être réunis en un seul être. Pour la première fois votre solitude vous apparaît très clairement. Quoi qu'il en soit, vous êtes seul-e !
Toutes ces fictions selon lesquelles il doit y avoir quelqu'un qui est exactement fait pour vous, quelqu'un qui devrait combler cet intervalle, ce vide, en vous. . . personne ne peut le faire ! Non pas que personne n'aimerait le faire, non, tout le monde aimerait le faire! Mais c'est simplement impossible de par la nature même des choses.
C'est bien, je le répète, que ce ne soit pas possible, de par la nature même des choses, parce que si ça avait été possible, la religion n'aurait pas été nécessaire - il n'y aurait plus eu aucun besoin de la religion.
Vous me demandez : "Y a-t-il un besoin essentiel de religion chez 1"homme?" Oui, mais il arrive seulement lorsque vous avez fait 1'expérience que votre solitude était absolue !
Vous ne pouvez pas vous duper vous-même par 1’amitié, par 1’amour, par 1’argent, par le pouvoir. Vous ne pouvez pas tromper vous-même continuellement. Un moment va finir par arriver où vous allez voir que tous vos efforts ont totalement échoué. Vous êtes toujours aussi seul que vous l'avez toujours été.
C'est à ce moment-là que la religion fait son apparition. La religion n'est rien d'autre qu'un virage à cent quatre vingt degrés - depuis 1'autre, vers vous-même.
Vous avez essayé 1'autre, ça ne marche pas. L'autre n'en est pas responsable. L'autre n'a pas créé la loi universelle. L’autre fait partie de la loi universelle exactement comme vous.
Si votre compréhension va un tout petit peu plus profond… Sartre était juste au bord, il aurait pu se tourner vers lui-même. Mais il s'est arrêté là: 1’autre est l’enfer. Il a condamné 1'autre, mais il n'a pas fait demi-tour pour faire un essai avec lui-même. Vous avez fait un essai avec beaucoup de gens dans votre vie en allant chercher la personne la plus éloignée pour en faire votre intime. Vous avez réussi à 1'amener très proche, très très proche, et au dernier moment, quand il ne manque plus qu’un pas. . . ça a échoué.
Le mental humain dit : "Peut-être que ce n'est pas la bonne personne. Trouve une autre personne. Cherche une autre personne". Le mental vous donne continuellement de l'espoir, "Si ça n'a pas marché avec cette femme, cet homme, ça peut arriver avec quelqu'un d’autre. Peut-être as-tu essayé avec une mauvaise personne." Le mental trouve continuellement des excuses, des explications, des rationalisations, mais elles sont toutes futiles –
Ces rationalisations, ces explications, ces excuses, ces consolations vous tiendront éloigné-e de la religion. Sartre aurait pu devenir un de ces hommes religieux, ce qui est très rare; un phénomène très ordinaire, mais cependant très rare, car personne n'essaie 1'ordinaire; tout le monde est après 1’extraordinaire.
La religion, c'est quand 1'amour a échoué.
Je suis pour 1’amour.
L'enseignement que j’ai donné toute ma vie était en faveur de 1’amour. La raison en est étonnante. Mais je suis un homme excentrique. Je vous ai appris à aller dans l'amour, car je sais qu'à moins d'arriver à ce point crucial, là où l'autre est 1'enfer, vous ne deviendrez jamais religieux.
Je ne suis pas pour 1’amour.
Tout mon effort est tourné vers la religion.
Les pseudo-religions vous donnent des formules toutes faites, et je veux vous donner la réelle expérience, mais je ne peux pas vous la donner. Je ne peux que vous montrer le chemin, je peux vous expliquer comment ça se passe, et puis vous laisser libre d'en faire 1'expérience, si vous le voulez.
Si 1'amour n'a pas échoué, vous n’êtes pas encore assez adulte pour la religion. Vous n'êtes pas assez âgé. Quel que soit votre âge, ce n’est pas la question; ça peut être soixante, peut-être soixante dix, ça n'a aucune importance.
Si vous espérez encore que l'amour puisse réussir, c'est que vous êtes sous-âgé.
Mais si vous êtes parvenu à en prendre conscience totalement, que c'est contre la nature des choses, que 1'existence ne marche pas de cette façon… Vous êtes vous, l'autre est 1'autre.
Si vous voulez goûter à 1'expérience de 1'existence, ce n'est pas via l'autre, c'est un saut direct à l'intérieur de vous-même. C'est via vous, à travers vous.
Et seul 1’amour, et son échec, peut vous projeter à l'intérieur. Rien d’autre ne peut le faire, car tout le reste est bien inférieur a 1'amour.
De 1'argent - vous pouvez en avoir assez, et en avoir marre, mais cela ne veut pas dire que vous allez vous diriger vers la religion. Il y a tellement d'autres choses. Vous pouvez penser que 1'argent est inutile, mais l’argent peut vous donner le pouvoir. Il peut faire de vous le président du pays. C'est peut-être ce que vous recherchez. Vous pourriez devenir le président ou le premier ministre du pays. La vie est courte; la plus grande partie, vous l'avez perdue à gagner de 1'argent, et maintenant vous allez perdre le reste à courir après le pouvoir. Et c'est comme une échelle: barreau après barreau vous devez vous élever.
Il y a toujours un barreau au-dessus de vous, et qui vous signale: "Arrive jusque là, c'est là que se trouve ce que tu veux".
Et quand vous parvenez à cet échelon, il y en a un autre au dessus. Une fois de temps en temps, un idiot entêté arrive à atteindre le dernier échelon, celui à partir duquel il n' y a plus nulle part où aller, car il n'y a cette fois plus d'autre échelon à gravir – 1’échelle se termine. Mais quand vous avez fait tellement d'effort pour 1'atteindre, pourriez-vous admettre devant ceux qui se battent derrière vous: "N’insistez pas. Je n'ai rien trouvé de spécial ici. J'ai perdu toute ma vie et maintenant je me trouve au dernier échelon, et tout ce qui me reste à faire est de sauter et de me suicider. II n'y a rien de plus ici" , ça voudrait dire que vous acceptez votre stupidité.
Non, un homme qui s'est donné autant de mal pour atteindre le sommet… et au moment où il arrive, il est proche de la tombe! Il est donc préférable de continuer, de sourire - le sourire de Jimmy Carter…
Je suis vraiment peiné pour Jimmy Carter. C'est vraiment un pauvre homme. Il a du redescendre de 1'échelon le plus élevé - retour sur terre. La totalité de son sourire a maintenant disparu. J'ai vu ses photos après qu'il ait perdu les élections, j'ai systématiquement regardé toutes ses photos: il n'y a plus une seule photo avec cet énorme sourire qui devait être le plus grand du monde. Qu'est-il arrivé à ce sourire? Ce sourire était factice. Même quand il était au sommet, il était factice. Mais quand vous avez été dans les jeux du faire-semblant, dans les jeux de la politique, vous y devenez tellement habitué. . . rien que d'avoir cela à portée de la main est juste du suicide. . .
Les Américains sont des gens très avisés. Ils ont assassiné vingt pour cent de leurs présidents. C'est d'une grande sagesse. Ils ont sauvé ces vingt pour cent de la situation même dans laquelle Jimmy Carter se retrouve.
Si quelqu'un 1'avait assassiné lorsqu'il souriait, c’est au moins lui qui aurait eu le dernier sourire. La mort arrivera de toute façon. Elle arrivera tôt au tard, mais il n'y aura plus de sourire. Toute personne qui devient le président d’un pays essaie de rester président jusqu'à sa mort. Tout le monde veut mourir en tant que président, ou que premier ministre, quel que soit le poste le plus élevé. Car il a mis toute sa vie à faire grandir cette personnalité factice, laissez-le au moins maintenant avoir 1'honneur de mourir en tant que président ou que premier ministre du pays ! Oui, il le mérite; il a travaillé dur pour ça. Et la plupart du temps ça se passe comme ça, soit il est assassiné, soit il meurt d'une crise cardiaque !
L’Inde a eu six premiers ministres depuis l’indépendance. Le premier premier ministre fut Jawaharlal Nehru, le meilleur politicien parmi tous les politiciens du monde, pour une raison simple: il n’était pas un politicien. Il fut entraîné dans la lutte pour la liberté en Inde, et il n'avait aucunement 1'idée d'arriver au pouvoir. Il n’était pas fait pour être un politicien. Il avait une âme si sensible qu'il aurait pu être un grand poète, ou un grand peintre, ou un grand musicien, n'importe quoi, mais pas un politicien. Je 1'ai rencontré plusieurs fois. I1 était complètement d'accord avec mes idées, mais il me dit, les larmes aux yeux : "Tout ce que vous dites peut effectivement transformer tout le futur de 1'Inde, mais vous n’avez aucune idée de la mentalité collective des masses. Elles ne peuvent pas comprendre ce que vous dites; elles seront contre vous. Vous ne pouvez pas réussir à transformer leur mental, vous ne pouvez réussir qu'à vous faire crucifier par elles".
Il fut terriblement choqué par 1'invasion de 1'Inde par la Chine. Il tomba malade, et ne se remit jamais du choc. Il mourut premier ministre de 1’Inde. C'était un grand prêcheur de la paix, de le fraternité, de 1'amour, et il avait créé un troisième bloc contre l'Union Soviétique et l'Amérique, pour que ces deux camps ne soient pas les seuls et qu'il y ait un autre camp, et celui-là neutre. Il avait réussi à créer ce troisième camp, neutre.
La Chine en faisait partie, et la Chine en était même la partie la plus importante, et la Chine attaqua 1’Inde. A la frontière Himalayenne, il est très difficile de se battre avec les Chinois. Les Indiens ne vivent pas dans 1'Himalaya, mais dans les plaines. Ce coté-ci des Himalayas est Indien, 1'autre est Chinois.
Des millions de chinois vivent de 1'autre coté et ils sont habitués aux neiges éternelles de 1'Himalaya. Ils peuvent se battre. Vous ne pouvez pas survivre avec eux. Si le combat dure, dans 1'Himalaya, personne ne peut les battre. La même chose arriva avec l'Allemagne. C’est arrivé à la première guerre mondiale; c'est également arrivé quand Napoléon attaqua la Russie; dans la première guerre mondiale ce fut lorsque l’Allemagne attaqua la Russie. Lors de la seconde guerre mondiale, Hitler commit la même erreur: i1 attaqua la Russie. La Russie est vaste - un sixième de la superficie de la terre entière - et pendant six à neuf mois elle est recouverte de neige, aussi ne peut-on se battre que pendant trois mois. A partir du moment où la neige commence à tomber, personne ne peut plus se battre avec les Russes. Ils y sont habitués, leur psychologie y est habituée, depuis des millions d'années. C'est chez eux. Mais pour toute autre personne, c'est la mort.
Napoléon fut liquidé là. La première guerre mondiale se termina là, et Adolphe Hitler fut fini là aussi. C'était un défi de sa part, c'est pour cette raison qu'il attaqua la Russie. Parce que Napoléon y fut battu et que dans la première guerre mondiale l'Allemagne y trouva la défaite. Adolphe Hitler voulut prouver que la Russie n'était pas impossible à conquérir. Mais il ne s'agit que d'une chose naturelle. Quand la neige se met à tomber, personne ne peut avoir la victoire en Russie; vous ne pouvez donc pas vous battre en Russie. La même chose est vraie avec la Chine. La Chine représente un quart de la population du monde - le plus grand pays du monde. Quand la Chine attaqua 1'Inde, ils envahirent des milliers de kilomètres dans les Hiamalayas et 1'Inde ne put rien faire. Ce fut un tel choc pour Jawaharlal. Lui qui était en très bonne santé avant cela, il commença à se recroquevil1er, à mourir. À ce qu'il me semble, il mourut d’une mort psychologique. Ou, pour être plus précis, il commit un suicide psychologique. Il perdit tout espoir de paix, d’arrêt des guerres dans le monde, car la Chine était le plus proche ami de l'Inde... si vous ne pouvez pas même faire confiance à votre plus proche ami, a qui allez-vous faire confiance?
Il perdit d'un coup toute joie. Il devint soudain vieux.
Le second, premier ministre fut Lalbahadur Shastri. Il était très intéressé par moi, et il promit, bien que son parti et ses collègues n'étaient pas d'accord, qu'il ferait de son mieux pour implanter mes idées. Mais il mourut d’une crise cardiaque, en Russie.
Sa secrétaire me raconta que tout au long du voyage, il avait lu mon livre, Graines de révolution. La nuit où il eut sa crise cardiaque, mon autre livre, Le Parfait Chemin était dans ses mains.
Le troisième premier ministre de 1’Inde vient tout juste d'être assassinée. Elle fut la plus courageuse, et la plus prête à faire des choses qui vont contre la mentalité des masses. Je lui avais suggéré de rejeter de son cabinet des gens comme Morarji Desai. Elle dit : "C’est un des pires fanatiques, et quelqu'un qui croit être toujours juste… "
II était député-premier ministre, le second après Indira Gandhi, mais elle dit qu'elle essaierait, et elle le fit.
Le quatrième premier ministre fut Morarji Desai. Personne ne le considéra digne d’être assassiné, il vit donc encore et il essaie maintenant de devenir un saint ,- le même jeu de pouvoir. Charan Singh, le cinquième premier ministre, ce n'est même pas la peine d’en parler. Et Rajiv, nous avons encore à attendre de voir s'il prouve être digne de son grand père et de sa mère, ou pas. J'ai la certitude intérieurement qu'il ne décevra pas le pays.
Jimmy Carter vieillit d’un coup de dix ans quand il perdit les élections; en un jour, dix ans passèrent ! Quand les gens sont au pouvoir, ils arrivent à sauver la face. Elle peut être peinte, mais cependant ils semblent jeunes, vivants, forts, et ils le sont bel et bien, parce qu'ils ont réussi.
Malgré tout, une fois arrivés au sommet de la réussite, ils trouvent cela futile, mais quel serait 1'intérêt de le dire? - le monde entier s'esclafferait ! Mieux vaut garder le silence et sourire sans fin.
Ainsi donc, vous pouvez aller de l'argent au pouvoir, ou du pouvoir à 1’argent. Et il y a beaucoup de possibilités.
J’ai entendu parler d’un Américain, riche, qui en eu assez de l’argent qu'il avait gagnée… et il y avait passé toute sa vie. Quelqu'un lui suggéra: "Pourquoi n'allez-vous pas en Orient à la recherche d'un mahatma, d'un sage, qui puisse vous enseigner comment être calme et tranquille, en béatitude?" Il fonça en Inde, vint dans 1’Himalaya et se renseigna où il pouvait trouver le plus grand saint - comme s'il y avait des petits saints et des grands saints.
Mais c'était quelqu'un qui connaissait 1'argent, et qui savait que si vous n'avez qu’un peu d'argent vous êtes un homme sans importance, si vous avez davantage d'argent vous êtes un homme plus grand, et si vous en avez encore plus vous êtes le plus grand. La même chose devait être vraie en spiritualité - combien avez-vous? Il avait vécu de 'quantité' sa vie entière. L'argent est quantité. La spiritualité est qualité. Elles ne sont pas interchangeables, mais, même en Inde, les gens pensent de la même façon que partout ailleurs.
On lui dit; "Oui, il y en a un, le plus grand sage, le plus grand mahatma, il vit dans les Himalayas, sur une montagne élevée, très difficile à atteindre. Beaucoup sont morts en le cherchant, ou se sont perdus dans les neiges."
Mais le riche dit : "Je n'ai rien à perdre, j'ai vu tous les plaisirs du monde, et il n' y a plus rien qui ait encore de l'intérêt pour moi. C'est un défi excitant que personne ne l’ait encore trouvé. J'essaierai." A nouveau 1'excitation de vivre recommença à vibrer, de la même façon que le jour où il avait commencé à s'investir dans 1’argent - le même ego.
« Personne ne l’a trouvé; je le trouverai ! Décrivez-moi simplement à quoi il ressemble et sur quelle montagne il est, et j’irai. » Ils le lui décrivirent en détail et il partit.
Ce fut un voyage terriblement pénible, mais il avait su combien c'avait été pénible aussi de gagner de l'argent. S'il avait réussi à parvenir au sommet en ce qui concernait 1'argent, il allait bien être capable de se débrouil1er là aussi. Et il se débrouilla, en loques, presque mort, mais il arriva finalement, et vit 1’homme assis sur un sommet, il tomba, non pas de gratitude, mais épuisé. Car autrement les Américains ne savent pas comment tomber aux pieds, quand ils rencontrent le Maître - il tomba tout simplement. Il perdait tout espoir, il était sur le point de penser, "J'espère encore contre tout espoir." Et tout à coup, cet homme, ce vieil homme est là. Il tomba, et juste parce qu' il ne mourut pas avant de pouvoir commencer à parler, il étendit ses mains, prit les pieds du sage dans ses mains et dit: "Vous êtes un grand sage et je suis venu d'Amérique, de milliers de kilomètres. Mais ce n'est rien. Ce pèlerinage dans l'Himalaya, à pieds… mais je suis content d'être arrivé. Maintenant dites-moi s'il vous plaît ce que je dois faire?" Le mahatma dit : " Faites-moi d’abord une faveur. Est-ce que vous avez une cigarette - de marque américaine?"
L'homme fut très choqué. Mais il avait entendu dire que les sages étaient des gens bizarres; il y avait peut-être un truc derrière. Il sortit une cigarette et un briquet, et en donna une au sage : "Et maintenant qu'est-ce que vous avez à me dire?"
Et le sage répondit : "S'il vous plaît, repartez de la même façon que vous êtes venu. Mais rappelez-vous, si vous revenez à nouveau, n'oubliez pas d’amener des cigarettes; elles rendent si paisible, elles donnent tellement de béatitude. Je les aime vraiment !"
Vous pouvez aller d'une stupidité à une autre, mais si vous échouez en amour… et échouer en amour ne signifie pas ce que vous voulez ordinairement dire par là: que le bien-aimé-e vous a trompé ou que 1’amant-e vous a trompé. Non, ceci n’est pas échec; en fait, cela, c'est éviter l'échec. Si votre bien-aimée vous a trompé avant 1’échec - mon échec - elle vous a sauvé, elle vous a donné à nouveau de 1’espoir. Vous allez vous précipiter sur une autre femme.
Par échec, j'entends: quand vous atteignez le point où vous aimeriez vous fondre en 1'autre, et que soudain vous rencontrez la loi universelle contre la fusion.
Les corps peuvent se rencontrer, les êtres ne le peuvent pas.
A ce moment, ou bien vous devenez acide et amer contre 1’amour – c’est comme ça que toutes les religions sont devenues acides et amères contre 1’amour, mais ceci n'est que pseudo-religion. Non, je ne vois pas que vous deviez devenir acide et amer. En réalité vous devriez devenir extatique d'avoir découvert une loi fondamentale de la vie, d'être arrivé à un point à partir duquel il est possible de se tourner vers l'intérieur. Il n'y a plus nulle part où aller. Vous pouvez… tombez sur vous-même ! Si cela se produit, vous allez alors dire: "L'autre est le paradis, pas 1'enfer." Vous allez alors changer cette déclaration. L'autre a rendu passible pour vous cet échec dans la fusion, dans la dissolution, et il vous a ainsi donné la chance de vous tourner vers vous-même; vous en serez reconnaissant pour toujours. L'autre est alors le paradis.
Et une fois que vous entrez dans votre propre être, vous êtes entré dans le temple. C'est tout ce qu’est la religion. L’entrée en soi-même est 1'ultime croissance.
Tout à coup vous fleurissez.
Ce n'est pas un lente croissance progressive, non. Le mot croissance donne une fausse impression, comme si lentement, lentement... Non, c'est une soudaine explosion. Un moment avant vous n'étiez rien ;1'instant suivant, un bond quantique - vous êtes tout. Car vous avez goûté à votre être, et cet être est exactement le même que l’être universel, mais c’est la seule porte disponible. Il n'existe aucune autre porte.
Aucune église ne peut vous aider, aucune synagogue, aucun temple.
Il n'y a seulement qu'une porte qui puisse vous aider, et c'est à l'intérieur de vous.
En faisant un saut a 1’intérieur de vous-même, vous avez plongé dans l'existence.
À ce moment vous sentez un immense sentiment d'unité avec tout.
Vous ne vous sentirez plus jamais esseulé-e, solitaire, puisqu'il n'y a plus personne qui soit autre que vous.
Il n'y a plus que vous, étendu dans toutes les directions, dans toutes les manifestations possible.
C'est votre floraison dans les arbres, c'est vous, vous déplaçant dans le nuage blanc, c'est vous dans 1'océan, dans le fleuve. C'est vous dans l'animal, dans les gens.
Et ce n'est pas quelque chose que vous avez à projeter ou à penser. C’est ce que les pseudo-religions ont fait. Elles vous disent: "Pensez que vous êtes un avec tout. Concentrez-vous. Disciplinez votre esprit, pour qu'il voit que vous êtes un avec tout" . Oui, si vous vous y mettez vraiment vous allez commencer à y croire, que vous êtes un avec tout, mais ce ne sera seulement qu'une croyance.
Un Soufi me fut amené un jour; il y avait beaucoup de gens qui le suivait. Quelques uns d'entre eux étaient venu me voir et m’avaient dit: "Quand notre Maître viendra, on aimerait que vous vous rencontriez tous les deux." Et il ne venait qu’une fois par an à cet endroit.
Je leur dis: "Lorsqu’il sera là, vous 1'amènerez." Ils dirent : "C’est un homme réalisé. Il voit Dieu partout."
Je répondis: "Je ne ferai aucun commentaire avant de le voir."
Le jour arriva, il vint. Je dis à ses disciples, "vous 1’amenez directement ici. Permettez qu'il soit mon hôte." Ils l’amenèrent directement de la gare, et il était dans un état de fièvre extatique, si on peut dire. Ses yeux, son corps, étaient complètement - pas dans un état ordinaire - vibrants. N’importe qui pouvait le voir. Il enlaçait les arbres. J'avais un magnifique jardin. J'étais le seul à appeler ça un jardin, tout le monde disait une jungle ! C'était vraiment la jungle, car je n'aime pas du tout les jardins anglais - bien coupés, symétriques. Non, je veux quelque chose comme une jungle, où il n'y a pas de symétrie.
II arriva à la porte, et juste à coté il y avait un très beau maulshree (non d'un arbre). Il le prit dans ses bras. Il était en fleur, et c'est un des parfums les plus beaux. Il se mit à pleurer de joie. Je dus le retirer de 1’arbre. Je lui dit : "Cet arbre n'est pas encore assez grand. Vous risquez de le tuer. Venez s'il vous plaît à 1’intérieur, et si vous voulez tenir des arbres dans vos bras, j'ai beaucoup d'autres grands arbres, et vous pourrez leur faire autant d’embrassades et de lutte et de gymnastique que vous voudrez. Mais celui-là ne le torturez pas".
Soudain la colère: "Quoi?" dit-i1 "Est-ce que vous êtes en train de dire que je torture l'arbre? Je l'aime !"
Je dis: "Je sais. Quelquefois vous pouvez prendre quelqu’un dans vos bras avec amour… cela m’arrivait quand je voyageais au Punjab."
Le Punjab doit être 1'Oregon de l'Inde. Il semble que tous les idiots du pays se sont débrouillés pour vivre au Punjab.
C’était très difficile pour moi de descendre du quai pour atteindre la voiture, car tout le monde me voulait dans ses bras, par amour - mais un hug Punjabi. . . vous ne pouvez pas imaginer ce que c'est; tout mon corps était douloureux et particulièrement mes côtes. Je dis à mes amis, "S’il vous plaît des hugs (être pris dans les bras) comme ça… je ne suis pas en état de recevoir autant d'amour. C’est trop. Vous devez 1'empêcher, autrement j'arrêterai de venir au Punjab."
Ces idiots ne savaient pas que hug ne veut pas dire que vous broyez 1’autre personne. Et c'est ce qu'ils faisaient avec beaucoup d'amour, mais avec beaucoup d'amour vous pouvez tuer !
Aussi je dis au Soufi, "Venez dans la maison. Ne soyez pas en colère, cet arbre n'est pas encore assez fort, et cet arbre est très spécial, ne le détruisez pas. Je suis devenu illuminé sous un maulshree. Aussi mes amis ont apporté cet arbre qui vient d'une graine de l'arbre d'origine. Ils l'ont fait pousser, et il n'est pas encore assez fort pour votre hug. Venez à 1'intérieur."
II entra et se mit à parler de la même façon qu’il devait parler à ses disciples: "Je vois Dieu partout, seulement Dieu et rien d'autre".
Je lui dis : "Si vous voyez Dieu et rien d’autre, alors à qui êtes-vous donc en train de parler? S'il n’y a que Dieu et rien d'autre à qui parlez-vous? Et dans quel but? Dieu doit le savoir. Restez silencieux."
Et quand tous ses disciples furent partis je lui dis: "Je sais ce qui vous est arrivé. Vous vous êtes hypnotisé vous-même pendant trente ans, disant que Dieu est partout, et c’est maintenant devenu comme une suggestion post-hypnotique en vous. Et vous la faites se poursuivre, car vous savez très bien que si vous arrêtez de parler de cela, ça va disparaître en quelques heures."
II dit: " Non, cela ne peut pas disparaître. Je vois Dieu partout."
Je lui dis: "Pendant trois jours vous allez arrêter de parler de Dieu, et arrêter de pratiquer quoi que ce soit, que Dieu est partout' - ne le répétez pas; pendant trois jours, oubliez-le. Pendant trente ans vous avez fait votre travail, maintenant laissez-moi vous montrez, en trois jours, ce que vous avez gagné en trente ans."
Et cela ne demanda pas... trois jours ne furent même pas nécessaires. Le lendemain matin il me dit: "Ce que j'ai gagné en tente ans vous 1'avez détruit en un jour. Vous êtes contre la religion. Vous êtes un ennemi de la religion."
Je lui dis: "Naturellement je suis un ennemi de la religion - de la sorte de religion dans laquelle vous croyez. Je suis contre tout ce non-sens, car à quoi sert de pratiquer quelque chose pendant trente ans, si cela peut être perdu en un jour? Vous pouvez aussi bien le pratiquer pendant trois cent ans, ce sera perdu en trois jours! Ou pendant trois vies, et ce sera peut-être trois mois - mais cela peut être détruit. Ce n'est pas votre expérience, ce n'est qu'une idée toute faite."
Aussi je ne dirai pas que vous devez vous mettre à penser que chaque chose est divine et que tout est Dieu. Ce n'est que de la pacotille. Ne vous investissez jamais dans quelque chose qui n'est, à la base, qu'une croyance. Faites le saut à 1'intérieur de vous-même, et ne me demandez pas ce que vous y trouverez. Si je vous le dis ce que vous y trouverez, vous allez immédiatement commencer à vous hypnotiser vous-même dessus. Vous le trouverez alors, mais ce ne sera pas la chose véritable. Ce ne sera qu'une hallucination. Faites juste le saut à 1'intérieur de vous-même, et vous en viendrez à découvrir. Vous en viendrez à ressentir. Vous en viendrez à expérimenter.
La religion, c'est expérimenter la vérité.
L’homme a besoin de la religion; c'est le tout dernier luxe, le luxe ultime.
Au-dessous, c'est 1’amour. Et j'ai toujours énormément enseigné l'amour, afin que vous puissiez en arriver à ce moment crucial, où vous ressentez que 1'autre est 1'enfer, car c'est le tournant. Il est nécessaire que quelqu'un dise à Sartre: "L'enfer, c’est 1'autre. Et en ce qui vous concerne, vous? Vous avez tellement essayé d'être un avec 1'autre, pourquoi ne pas essayer un peu d'être un avec vous-même, car ça ne sera pas bien difficile. Vous êtes déjà un avec vous-même, vous avez juste à regarder à 1'intérieur".
Se tourner un peu vers 1'intérieur… et 1'Happening !
Mais alors vous n'êtes ni Chrétien, ni Hindou, ni Musulman, ni Juif — vous êtes simplement religieux !
Je suis pour la religion, pour 1'état religieux, et je suis certainement contre toutes les religions, car elles sont toutes pseudo !
OSHO From unconsciousness to consciousness
Discours du 25 novembre 1984 © Osho International Foundation
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